mardi 8 janvier 2013

Lettre à mes kilos


Mon cher gras,
 
Je sais, ce n’est pas une période très facile, pour toi, en ce moment. Tu as pris tes aises, pendant les fêtes, tu t’es laissé aller, profitant du régime chocolat-magret pour conquérir de nouveaux territoires, parfois inexplorés. 

Mais la nouvelle année a commencé. On a retiré la perf de foie gras, on a pris de bonnes résolutions. Tu trembles pour ton avenir.

Et tu fais bien. Autant que tu le saches tout de suite, ceci est une lettre de rupture. Je te quitte, mon gras. 

Oh, tu peux rigoler. Je ne suis pas naïve, c’est pas la première fois que j’essaie de te larguer. Je sais bien que ce n’est pas si simple que ça. Que tu vas me coller encore un bout de temps, me supplier de te garder, de prendre soin de toi, de te donner encore plus de place, plus de temps, d’énergie. Tu vas me tenter, essayer de me séduire par tous les moyens. Je sais même que je vais sûrement craquer, regretter, rechuter, te requitter… Comme d’hab, quoi. 

C’est comme ça depuis le début, entre nous.
Tu as attendu mon adolescence pour m’approcher. Maintenant que j’y pense, tu étais là avant, dans mes gènes, dans mes complexes naissants. Tu attendais ton heure, patiemment.

D’abord, tu as profité de l’invitation que t’ont envoyée mes hormones. Un peu (euh, beaucoup) dans les seins, un peu dans le cul, et hop, j’en rajoute en douce. Le bide, les cuisses, et le reste, si j’étale bien, ça passera inaperçu. 

Puis tu as dû trouver l’endroit agréable, alors tu as décidé de t’installer. Allez zou, on apporte sa brosse à dents, puis une valise, et quelques mois après c’est les déménageurs qui sonnent à la porte. Pour la cellulite, c’est par là. Et les vergetures, je les mets où ? 

Mais toujours en douceur. Tu n’as pas débarqué du jour au lendemain comme une brute, non. Tu m’as séduite, tu as profité de mes faiblesses. Un chagrin d’amour, une engueulade avec une copine, un anniversaire où je ne suis pas invitée, un dimanche après-midi d’ennui, une tristesse passagère, une angoisse d’ado, une solitude… et tu me réconfortais, me tenais compagnie.

T'es triste? Fais-nous un câlin!





Entre nous, c’est devenue une habitude. Un vieux couple. Je m’étais habituée à ta présence. Elle me pesait parfois, mais je n’avais pas la force de te foutre dehors. Bien sûr, il y a eu des engueulades, j’ai même réussi à me débarrasser de toi quelques fois, mais ça n’a pas duré. Tu es têtu, et peu importe à quel point je te maltraitais, tu revenais toujours ; tu savais qu’il y aurait toujours un moment où je me laisserais aller à te reprendre.

A une époque, quant tu t’es vraiment senti à l’aise, tu as même pris le contrôle sur ma vie. Tu étais tyrannique, intraitable. A vouloir m’empêcher de sortir, de mettre telle robe, de draguer tel mec. Tu voulais prendre toute la place, et je l’avoue, à une époque tu as réussi. 

Puis la vie a continué, on a continué, ensemble. La situation n’était pas idéale, menfin, elle était stable, on y trouvait notre compte. 

Quand je suis tombée enceinte, j’ai eu peur, très peur. Fini, le statu quo, t’avais trouvé une ouverture, t’allais te réveiller, t’étaler encore, profiter de la moindre faiblesse, des nausées, des envies, de la fatigue, du manque de temps, en mettre partout, m’envahir encore plus. 

On s’est battus, les deux fois, et je t’en ai voulu de gâcher ces moments qui devaient être uniques et joyeux (enfin, sauf les hémorroïdes avant et les nuits de 2 heures après, mais ça il paraît que ça fait partie du package). 

Finalement, j’ai réussi à te contenir à peu près, mais je sais que tu n’as pas dit ton dernier mot. Encore un bébé ou deux, sans compter les années qui s’ajoutent et les paquets de bonbons pour les enfants dans le placard, on va bien réussir à me rajouter un ou dix kilos sur le cul, non ?

Alors voilà, aujourd’hui je te le dis : je te quitte. J’te largue, j’te jarte, j’te vire, tu peux rentrer chez ta mère. 

Je sais, je sais, tu vas rester quand même. T’es un peu con et borné, tu comprends pas quand on veut plus de toi. Mais je m’en fous. J’ai plus envie de tout faire en fonction de toi, tu vois.
Quand je mange quelque chose, j’ai envie que ce soit parce que c’est bon, ou parce que mon corps en a besoin. Pas pour toi ou contre toi. Quand je me regarde dans la glace, j’ai envie de me voir, moi. Pas toi. 

Bon, on n’oublie pas du jour au lendemain un compagnon de 20 ans. Je ne dis pas que je vais réussir, mais je vais essayer. 

Et je ne dis pas que ça me ferait pas super méga grave plaisir si tu finissais par comprendre le message et faire tes valises définitivement. Ce jour-là, ce serait la fête dans ma tête, crois-moi. Mais si ça n’arrive pas, tant pis. Je m’en remettrai. 

Tu vis ta life, je vis la mienne. 

Ça ne m’empêchera pas d’être belle, heureuse, aimée et amoureuse. Na.

(Note pour plus tard : garder une copie de cette lettre pour la relire la prochaine fois qu’il me prendra l’envie de faire des dukonneries)

P.S : Je t'emmerde. Et je n'ai pris qu'une seule part.

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